La démocratie du coucou *

Le colonialisme, cette plaie qui a souillé notre vingtième siècle n'est toujours pas éradiqué. Il continue de plus belle, en Irak, en Palestine. Il souille aussi ce début de troisième millénaire et est toujours aussi abject.

En suivant l'actualité, les massacres de populations, la construction du mur de la honte, le fait de traiter des résistants de "terroristes", la future déportation d'Arafat que "les voleurs de terre" essaient de faire passer pour une expulsion, m'a donné l'idée de rechercher ce texte de Louise Michel, déportée en Nouvelle Calédonie pour s'être engagée dans la "Commune de Paris" et que mes amis Kanaks d'Ouvéa ont diffusé en 1984.

Ce texte n'a pas pris une ride, Les coucous sont toujours là. Ils sont Israéliens, Américains.

Ginette Hess-Skandrani

20 septembre 2003

LA DEMOCRATIE DU COUCOU

Par Louise Michel

Nous vivions paisiblement dans une maison entourée d'un jardin fertile ; sur une partie caillouteuse, éloignée de la maison, une cabane où nous remisions les outils.

Un jour, deux étrangers frappèrent à notre porte. Comme de coutume nous offrîmes l'hospitalité.

Dès le lendemain, ils nous réunirent et déclarèrent : Nous vivrons désormais ici". Ils avaient des armes à la main, nous dûmes nous soumettre.

Quelque temps après, un des nôtres protesta contre l'intrusion. Ils le tuèrent.

Ils firent venir des leurs, prirent pour domestiques des hommes de pays voisins.

Alors, ils nous expliquèrent : "La cohabitation n'est plus souhaitable, vous ne vivez pas comme nous, et de toute façon la maison n'est pas assez grande….. La cabane, au fond du jardin, reste inutilisée, vous vous y installerez !"

Plusieurs années s'écoulèrent. Nous décidâmes de ne plus supporter cette situation.

Nous allâmes réclamer justice auprès des autorités du pays. "Qu'à cela ne tienne, nous répondit-on, nous organiserons un vote de tous les résidents de ce domaine…."

La voix du pouvoir ajouta ;"un vote dans le respect de la démocratie : un homme, une voix."

Dans la cabane, avec les enfants, nous étions sept. Dans la maison, avec les domestiques, ils étaient 10.

Nous étions, nous sommes Kanaks

Louise Michel 1878

Suite…

Ils ont construit un mur pour pouvoir voter entre eux.

Ils nous ont surnommé "terroristes", Après notre terre, la maison, le jardin, ils nous ont pris nos voix et nos illusions et fait une feuille pour la route…. de déportation

Nous étions et nous sommes toujours Palestiniens.

Ils nous ont volé nos terres, détruit nos maisons, abîmé nos champs, irradié, massacré, divisé, humilié.

Mais nous sommes toujours debout et la résistance s'organise.

Nous étions et nous sommes toujours Irakiens.

* Le coucou, tel un colonisateur, est le seul oiseau qui pond ses œufs dans le nid des autres.